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Bassin minier du Nord-Pas-de-Calais

      Affleurant a la frontiere franco-belge, le gisement s'enfonce progressivement vers l'ouest. Il est le prolongement du Sillon industriel qui fut et reste, de Mons a Liege et Verviers, la zone industrielle de la Wallonie. Son exploitation dans le departement du Nord a debute a Anzin au XVIIIe siecle. Mais les recherches en Artois etaient restees vaines, en raison d'un changement d'orientation des veines. C'est donc par hasard, en creusant un puits artesien qu'on en retrouvera la trace vers Oignies en 1841 Cette decouverte sera le point de depart d'une vaste campagne de prospection qui aboutira a la creation de nombreuses compagnies minieres.
       L'exploitation du gisement declinera a partir de 1960 et sera definitivement arretee en 1990.

La decouverte du bassin du Nord

      Les historiens ne sont pas tous d'accord sur la date exacte a laquelle la houille a ete decouverte et a commence a etre exploitee dans les regions de Liege et de Mons : vers la fin du XIIe siecle et au debut du XIIIe siecle , alors que ce n'est qu'au debut du XVIIIe siecle que l'on a trouve le charbon dans la region de Valenciennes. Il y a donc eu 500 ans entre ces deux periodes. Il y a a cela, a la fois des raisons geologiques et des raisons historiques. Les raisons geologiques sont assez simples : le gisement est de plus en plus profond vers l'Ouest, et, contrairement a ce qui se passe en France, en Belgique, les veines affleuraient en surface ou, quand elles n'affleuraient pas, etaient a une profondeur relativement faible, ce qui a grandement facilite aussi bien la decouverte que l'exploitation de la mine.
      ÒIl y a aussi des raisons historiques : cette region et Hainaut a ete, pendant tout le Moyen Age et jusqu'au XVIIe siecle , l'objet de nombreuses guerres et convoitises de la part a la fois du royaume de France que de la part de ses puissants voisins, la maison d'Autriche et la maison d'Espagne.
      C'est en 1668, avec le traite d'Aix-la-Chapelle, que les frontieres ont ete definitivement stabilisees. La ville de Valenciennes n'a, cependant, ete rattachee a la France qu'au Traite de Nimegue, en 1678. Valenciennes etait une ville de marchands tres prospere. Son expansion s'est poursuivie tres longtemps lorsqu'au XVIe siecle un certain nombre de villes belges commencerent a decliner du fait du developpement tres important des Pays-Bas. A partir de ce moment, Valenciennes a connu un trafic tres important avec le port d'Anvers grace a la navigation sur l'Escaut qui etait possible des cette epoque. En 1669, Valenciennes comptait 30 000 habitants, ce qui etait une population considerable pour l'epoque. Avec le rattachement a la France, cette population a diminue puisqu'elle n'etait plus que de 17 000 habitants. Par contre, tous les villages qui entouraient Valenciennes, ce que l'on appelait la prevote de Valenciennes, restaient pauvres et miserables. Valenciennes etait donc entouree d'un veritable desert. Sa population periclite apres 1670 pour ne remonter qu'au XIXe siecle, avec la decouverte du charbon.
      Jusqu'au debut du XVIII-e siecle, on ne s'etait guere preoccupe de decouvrir du charbon. A partir de la separation de Valenciennes d'avec la Belgique, on commenca a encourager les recherches et c'est en 1716 que se constitua une societe de personnes pour rechercher le charbon dans la region de Valenciennes. Les recherches furent extremement difficiles, car le gisement n'affleurait pas en surface et il fallait donc creuser un peu au hasard. On devait donc, au fur et a mesure qu'on approfondissait les puits, evacuer les eaux.
      C'est Jacques Desandrouin qui, avec quelques autres investisseurs, fonda la premiere societe de personnes en 1716. Ils confierent les travaux a un ingenieur, Jacques Mathieu (Belge de Ransart), directeur des etablissements Desandrouins a Charleroi et mirent en route le chantier le 1er juillet 1716 a Fresnes-sur-Escaut. Ils commencerent par creuser deux fosses qui furent rapidement inutilisables, puis quatre autres qui durent etre abandonnees a cause des eaux. Fin 1718, ils deciderent de creuser deux fosses un peu plus grandes. L'une des deux grandes fosses finit en 1720, apres 18 mois de travail acharne, par atteindre une veine de quatre pieds (a peu pres 1,20 m) a 35 toises de profondeur (a peu pres 70 m). A titre indicatif, une de leur mine en 1681 avait deja atteint une profondeur de 181 toises a Heppignies en Belgique. De ce fait, c'est l'annee qui a ete retenue comme la date de la decouverte de la houille dans ce bassin. On raconte que la veille de Noel de 1720, une planche qui, parait-il, aurait du etre en chene alors qu'elle etait en hetre, se rompit sous la poussee des eaux. Le chantier fut submerge et, malgre le travail acharne des mineurs et de l'equipe de Desandrouins, le 15 juillet 1721 les associes devaient decider d'abandonner les travaux, acceptant de combler les fosses et de vendre le materiel.
      Heureusement, Desandrouins et Taffin ne se sont pas decourages. Ils ont reconstitue une nouvelle societe quelques mois plus tard, le 1er septembre 1721. Ils ont construit deux nouvelles fosses dans la region de Fresnes et, en 1723, ont decouvert une nouvelle veine du type de celle qu'ils avaient decouverte en 1720. La fosse fut exploitee pendant quelques annees d'une facon continue. Ils voulaient absolument decouvrir du charbon qui puisse servir aux usines, aux ateliers et aux usages domestiques. C'est pourquoi les travaux furent poursuivis en creusant de nouvelles fosses, mais en se deplacant vers l'Est, vers la region de Valenciennes.
      Les travaux avaient coutes tellement cher que Desandrouins et ses collaborateurs etaient prets a abandonner, lorsque Desandrouins obtint d'eux la poursuite d'une ultime recherche. Celle-ci eut lieu tout pres de Valenciennes sur la rive gauche de ce qu'on appelait le Pave de Conde, ou se trouvent actuellement les Ateliers Centraux d'Anzin. C'est la que le 24 juin 1734 fut decouverte une houille qui pouvait servir a tous les usages.
      La premiere gaillette, aux dires de Desandrouins, avait coute 100 000 ecus, soit 300 000 livres. C'etait le debut d'une grande epopee. C'est a cette date que la Compagnie Desandrouins, n'ayant pas de main-d'?uvre sur place, commenca a faire venir des mineurs de Charleroi. Elle leur construisit des maisons et en 1736 elle commenca l'exploitation. Les premiers mineurs arrivent sur Fresnes en 1716 au nombre de 16 et ensuite en decembre un autre groupe de 21 personnes toutes de Gilly et Lodelinsart sauf deux du village d'Heppignies, qui est la seigneurie des Desandrouins depuis 1707.

La decouverte du bassin du Pas-de-Calais

      Ce n'est qu'un siecle apres la decouverte de la houille dans la region de Valenciennes que l'on commenca a decouvrir et a extraire de la houille dans le Pas-de-Calais. On peut s'etonner egalement du delai d'exploitation qui s'est produit entre le Nord et le Pas-de-Calais. La raison en est simple, on a tout simplement cherche dans le prolongement du Bassin minier belge et du gisement du Nord. En suivant cette ligne, on est alle dans la region d'Arras et de Doullens, alors que, a partir de Douai, le gisement s'inflechit nettement vers le Nord.
      On dit que c'est que tout a fait par hasard, a l'occasion d'une recherche d'eau, qu'en 1841 on decouvrit a nouveau du charbon dans la region d'Oignies. Quelques annees plus tard, on en decouvrait dans la region de l'Escarpelle et ce fut le depart d'une autre conquete, celle du Pas-de-Calais. Un certain nombre de Compagnies minieres se creerent apres 1850 qui ont nom : Courrieres, Dourges, Lens, Bully, Bruay-la-Buissiere, Marles-les-Mines et Ostricourt. Apres 1875, on developpa l'exploitation vers le Sud : Lievin, la Clarence et Drocourt.
      L'ensemble du bassin, y compris le Boulonnais fut nationalise pour former les Houilleres du bassin Nord-Pas-de-Calais (HBNPC). Apres la guerre et la nationalisation du bassin en 1946, il etait necessaire d'augmenter la production. Comme apres la guerre 1914 - 1918, on importa de la main-d'?uvre mais cette fois elle fut temporaire. Ce furent en particulier des prisonniers allemands dont la plupart regagnerent leurs pays quelques annees plus tard. En 1946, l'extraction etait deja remontee a 28 400 000 tonnes.
      En 1952 que l'on a atteint le niveau record de la periode d'apres-guerre avec 29 400 000 tonnes. Durant cette periode, la production a augmente d'a peu pres 1 200 000 tonnes par an et les effectifs ont diminue de 7 000. Le rendement a fait des progres considerables, ce qui n'etait pas difficile car il etait tombe tres bas pendant la guerre. En 1930, le Bassin avait battu son record avec 35 000 000 de tonnes alors qu'on n'a pas depasse depuis la guerre 29 400 000 de tonnes. Pourquoi? Il y a deux raisons : la premiere, c'est que de tres nombreuses fosses ont du etre fermees apres la guerre, soit parce qu'elles etaient epuisees, soit parce qu'elles etaient devenues tres difficiles a exploiter, en particulier dans la region de Valenciennes. Un certain nombre de fosses etaient devenues extremement couteuses. Il aurait fallu des travaux considerables pour les rendre exploitables. C'est ainsi qu'on a ete amene a arreter les exploitations a Crespin,a Thivencelles, a Douchy et meme dans la region de Denain. La seconde raison, c'est qu'entre 1930 et 1945, il y a eu des lois sociales reduisant la duree de travail, donc egalement la capacite de l'outil de travail.
      A partir de 1952 jusqu'en 1960, on entre dans la periode de stabilite du Bassin. La production reste constante entre 28 et 29 000 000 de tonnes et le rendement augmente pour atteindre un peu plus de 1.500 Kg a la fin de la periode. Au fur et a mesure que le rendement augmente, la production restant constante, les effectifs diminuent relativement lentement, mais a une allure qui n'est pas negligeable puisqu'ils se sont reduits de 4.700 au total dont 1.700 au fond.
      ÄPar contre, si cette periode est une periode de stabilite pour la production, c'est une periode de degradation tres vive des resultats financiers du Bassin. Au cours de la periode de 1945 a 1952, le bassin detenait une situation de monopole, mais il n'a jamais pu en profiter pour accumuler ce que l'on appelle aujourd'hui du cash-flow ou moyens financiers qui permettent de garantir les mauvaises periodes. La periode 1952 - 1960 ne lui a pas non plus donne la possibilite de lutter a armes egales contre les differents concurrents qu'il a rencontres, que ce sait le gaz naturel ou le petrole. Il n'a pas pu augmenter ses prix pendant toute cette periode alors que les salaires ont continue a augmenter ainsi que les prix des fournitures. Il n'est pas d'industrie qui puisse resister a pareille situation surtout lorsque l'on sait que dans le prix de revient de l'exploitation de la production de charbon, la main-d'?uvre intervient pour 70%. Il n'est donc pas etonnant que vers 1960, les resultats financiers se soient degrades, les benefices tombant a 0. On a commence a entrevoir des la fin de cette periode le spectre du deficit. L'autre consequence de cette situation a ete la diminution des debouches du charbon.
      A partir de 1960, du fait de l'aggravation de nos resultats financiers d'une part et de la diminution de nos debouches d'autre part, on entre dans la periode qu'on peut appeler periode de declin. Cette periode peut etre divisee en deux parties : avant et apres 1967. Jusqu'en 1966, la decroissance de la production est seulement de 5 a 600 000 tonnes par an, la diminution des effectifs est plus faible que pendant la periode precedente, la croissance du rendement n'est pas brillante. A partir de 1967, on entre au contraire dans une periode de decroissance extremement rapide. Elle atteint 2 000 000 de tonnes par an avec une diminution considerable des effectifs. Pourquoi cette decroissance ? La degradation des resultats financiers a amene le gouvernement, en 1960, a etudier un plan de regression de la production charbonniere. Ce premier plan Jeanneney fixait des objectifs de production qui n'etaient pas tellement diminues par rapport a ceux de 1960. Jusqu'en 1966, la situation a ete relativement stable. Elle s'est tres serieusement deterioree a partir de 1967 a cause de la degradation accentuee des conditions d'exploitation du gisement au fur et a mesure qu'on s'approfondissait et de la diminution du personnel compte tenu du fait qu'a partir de 1960, le gouvernement a demande d'arreter l'embauche. Des cette date, le Bassin a ete amene a faire appel a la main-d’?uvre marocaine. En effet, a partir du moment ou l'on admet que la production va diminuer et ou, par consequent, les ouvriers doivent se reconvertir, si l'on veut quand meme maintenir l'extraction pendant un temps suffisamment long pour que la reconversion se fasse sans difficulte, il etait necessaire de disposer d'une main-d’uvre relativement jeune afin que la pyramide des ages ne se deteriore pas d'une facon trop grave. En 1966, sur un effectif total de 65 a 70 000 ouvriers, les ouvriers marocains etaient de 11.000 a 12 000. A partir de 1967, devant la diminution des possibilites du gisement, la main-d’uvre marocaine a du etre reduite (3 636 ouvriers marocains a fin 1980).
      Il est evident que l'evolution qui s'est produite depuis 1960 (diminution progressive des debouches et degradation des resultats financiers) n'a pas manque d'inquieter aussi bien les mineurs que la population de la region. Cette inquietude s'est exprimee a plusieurs reprises d'abord par la greve de 1963, par toutes les manifestations silencieuses qui se sont produites dans un certain nombre de villes de cette region, par la greve de 1968, bien que cette greve ait eu une origine plus nationale que locale, et par la greve d'Auchel -Bruay au debut de 1971. Cette evolution a amene tous les responsables, qu'il s'agisse du gouvernement, des syndicats ou des dirigeants des Houilleres, a prendre conscience de la necessite de prevoir et d'organiser la fin de l'exploitation charbonniere. Lorsque le gisement s'approfondit, les pressions de terrains deviennent beaucoup plus importantes et les conditions de travail sont plus difficiles. Il ne faut donc pas tellement s'etonner que les HBNPC abandonnent un certain nombre de ressources et que leurs dirigeants aient declare que dans les conditions du moment, il ne paraissait guere possible d'exploiter le Bassin au-dela des annees 80 a 85.
      Entre la these du maintien a tout prix de l'exploitation dans le Bassin et celle preconisant l'arret le plus rapide possible, les dirigeants des HBNPC ont adopte une position raisonnable qui a consiste a essayer d'etablir un programme de production et d'effectifs a long terme compatible a la fois avec les possibilites de reclassement du personnel du Bassin. Ce programme conduisait a cesser l'exploitation du Bassin autour des annees 1983. Puis, dans le courant de l'annee 1973, donc avant que n'eclate la «crise de l'energie», les dirigeants des HBNPC soulignerent que le rapide vieillissement du personnel apte aux travaux du fond et l'impossibilite de renforcer le rendement dans un gisement d'exploitation aussi difficile risquaient d'accelerer la chute de production du Bassin. Aussi, des le deuxieme semestre 1973, des mesures furent prises, d'une part, pour suspendre la conversion du personnel apte aux travaux du fond, d'autre part, pour embaucher, dans la region, du personnel ouvrier. Puis est intervenue la «crise de l'energie».
      Les etudes entreprises des le debut de 1974 par Charbonnages de France et les Houilleres de Bassin a la demande de la Delegation generale a l'energie ont eu pour objet de proceder a la reevaluation des reserves exploitables aux nouvelles conditions economiques et d'etudier les modifications eventuelles aux plans de production. Il en ressortait que l'avenir du Bassin ne pouvait etre profondement modifie. En effet, le quadruplement du prix du petrole n'a pas suffi a transformer le "plan social" de conversion des Houilleres en plan de relance.